Ce numéro est un numéro spécial consacré aux Foires et Marchés en Pays lyonnais.
Les foires et les marchés que nous fréquentons aujourd’hui pour nos besoins quotidiens et aussi pour notre plaisir nous relient aux temps reculés de notre histoire. En règle générale, nul ne sait quand ces foires et ces marchés ont commencé. Ou alors, si tel souverain a octroyé un droit de foire, si tel préfet – version moderne de l’usage ancien – a autorisé la tenue d’un marché, on a souvent le sentiment très net que c’est là une situation de fait que l’autorité s’est vue contrainte d’entériner. Ainsi, l’exemple récent de Craponne, où devant le refus réitéré de l’administration, les forains prennent les devants, s’installent de leur propre chef sur les emplacements désirés, imposant ainsi leur décision aux autorités, semble s’inscrire dans un processus séculaire.
Nécessité vitale en des temps où le commerce de détail n’existait guère, où la production familiale ou locale était souvent incapable de subvenir à tous les besoins, om les communications étaient malaisées et les échanges n’allaient pas de soi, les foires et les marchés ont poursuivi leur chemin à travers les aléas politiques ou économiques. Leur existence se perpétue paradoxalement dans le monde actuel où ventes, achats et échanges ont pris des formes multiples et souvent peu imaginables il y a quelques dizaines d’années seulement. Mais même quand l’objet du commerce a disparu, ne survivant que sous une dénomination pittoresque – foire aux échelles de Brindas, par exemple - , même si la nécessité économique n’est plus justifiée, puisqu’on peut facilement se procurer vêtements et objets domestiques dans n’importe quelle « surface de vente », voire par correspondance ou par internet, la foire se maintient contre vents et marées. Parfois très ancien, le marche du bourg ou du quartier peut disparaître, puis renaître à quelque distance de là, se modifier au gré des mutations sociologiques ou des besoins de l’époque, changer l’objet selon la demande et l’évolution de la production et des moyens de transport : veaux naissants contre veaux gras, alimentation et habillement contre bœufs et porcelets, « sublime de Bessenay » contre vieilles variétés de cerises…
Finalement, il n’est guère possible d’établir une typologie qui rende compte de ces deux institutions pour tous les lieux et a fortiori pour tous les temps. Des coutumes ancestrales s’éteignent, d’autres usages s’établissent, des lois sont promulguées ou votées, mais on a la surprise, au gré des nouvelles réglementations, de voir réapparaître par exemple les halles de Saint-Laurent-de-Chamousset, « avatar » des halles anciennes, édifiées il y a cinq siècles sur ordre royal, boudées et abandonnées il y a deux siècles, rasées sans égards il y a quatre-vingts ans. En 1525, il fallait « construire dans un lieu propice halles et loges pour tenir marchands, marchandises et denrées en sécurité et sauveté », et en 2007, « pour des raisons d’hygiène et de respect des normes », la Direction des Services Vétérinaires demande que le marché « soit installé dans une grande halle ». N’y-a-t-il pas là, compte tenu des différences dans le langage technique et administratif, plus qu’une coïncidence ?
L’Araire a donc réuni en une même brochure deux activités qui sont essentiellement différentes, comme nous le dit déjà leur étymologie. La foire est du domaine du loisir : sa base latine, feriae, s’applique aux jours chômés pour raison religieuse. Il n’est que de considérer la plupart des foires traditionnelles, de Quasimodo, du Lundi Saint, de la Saint-Martin : la lecture des articles qui suivent procurera une moisson abondante de ces fêtes dont « Monsieur le curé charge toujours son prône », selon l’amusante formule du savetier dans La Fontaine. Quant au marché, dont le nom évoque odeurs, cris des vendeurs, chalands et badauds, couleurs bariolées, son étymologie est bien plus austère : le latin mercatus désigne au premier chef la « transaction commerciale », et, au sens concret, le « lieu où s’effectue cette transaction » (« Le Robert, Dictionnaire historique de la langue française », 1992). Au risque de voir déchanter les amateurs de pittoresque, nous soulignerons donc que les locutions des économistes parlant de « marché à terme », d’ « étude de marché » ou de « marché boursier » sont au moins aussi vénérables que l’usage courant des bonnes gens qui vont tout simplement « faire leur marché ».
Et maintenant, abandonnons-nous au plaisir de flâner dans les pages de la revue, au hasard des foires et des marchés de nos villages.
Claude Longre
Résumés des articles de la revue
Foires et marchés en Lyonnais et Beaujolais
Christianne Lombard Déaux
Ce texte apporte quelques précisions à l’article du N° 136 concernant le privilège royal pour la tenue de foires et marchés à Yzeron. Un exemple décrit une enquête menée en 1775 pour l’ouverture de foires, qui aboutit rapidement après avoir suivi régulièrement les services administratifs. Un tableau des foires sous l’Ancien Régime complète l’article.
Le marché du jeudi à Bessenay
Joannès Porte
Cette description colorée et illustrée de détails précis permet de reconstituer l’atmosphère du marché en 1930 comme si nous y étions. Il s’y ajoute l’élément du temps, depuis l’aube jusqu’à l’heure où « le village reprend son train-train habituel ». Une belle page de littérature locale.
Le temps des cerises
Joannès Porte
Au plaisir de la lecture se joint la description de la cueillette des cerises, l’histoire et le renouvellement des variétés cultivées et l’évolution des structures de production et de commercialisation au fil du temps. Nous pourrons encore longtemps chanter « le temps des cerises » !
La foire aux échelles de Brindas
Alain Fabre
Publié dans un quotidien pour le 30 avril 2006, cet article fait l’historique d’une foire dont le nom pittoresque correspond à l’ancienne vocation fruitière du village : « Partout où l’on cueillait des fruits, il existait des foires aux échelles ».
Notes historiques sur les foires et marchés à Chazelles-sur-Lyon
Henri Bougnol
Les foires et marchés ont été pendant longtemps un des moyens privilégiés pour les échanges commerciaux dans nos campagnes. C’est le cas des communes des Monts du Lyonnais, situés sur deux départements, et notamment de Chazelles-sur-Lyon, chef lieu de canton de la Loire.
Les fruits de Courzieu
Maurice Esparon
La vie et l’histoire du village est marquée par la production de divers fruits. La première partie décline comme un poème les noms des variétés de toutes sortes de fruits du cru, puis un habitant de la commune raconte sa vie et son métier, qui suit les aléas de la production et de la conjoncture.
Le marché de Craponne
Henri Robert
Cet historique montre les difficultés que trouve une commune de création récente à ouvrir un marché hebdomadaire, devant les réticences de l’administration, mais aussi de ses propres commerçants. En fin de compte, ce sont les forains eux-mêmes qui parviennent à s’imposer.
Les foires des Halles
Charles-Henri De Fenoyl
Les foires du village ont une origine attestée très ancienne. L’article retrace l’histoire des foires et marchés des Halles, dont le nom, attestant l’importance des foires, a changé plusieurs fois au cours des siècles. Les fiefs où se tenaient les foires étaient recherchés à cause du prestige et des revenus qui y étaient attachés.
Marché et halles de Montrottier
Françoise Mathieu
Le marché existe depuis plus de six siècles. On peut toujours voir les belles halles du XVIIIe siècle, transformées en salle des fêtes. Avec l’évolution de l’agriculture, la vente des bestiaux a disparu, remplacée par le marché des fruits rouges.
Foire et réglementation : Riverie (1831-1844)
Franck Vergnon
Loin des Archives Départementales, la consultation des registres des délibérations du conseil municipal, surtout au 19°siècle, peut apporter des éléments oubliés de la vie locale. Sous Louis-Philippe, le roi bourgeois des Français, le commerce et les foires étaient déjà fortement encadrés.
Les foires à Savigny
Savigny - Patrimoine d’hier et de demain
Ce tour d’horizon historique fournit des détails concrets sur les marchandises et les commerçants des foires. L’existence des marchés est liée à la composition sociologique (ouvriers de la soierie) ou à l’activité agricole (marché aux fruits).
Les foires après la Révolution à Saint-Andéol-le-Château
Louis Tosolini
Après les « désordres de la Révolution », les foires sont rétablies. L’article évoque les nouveaux règlements et fournit détails et statistiques, ainsi qu’un calendrier d’époque des foires de l’arrondissement de Lyon. Le registre des délibérations indique que les droits versés par les commerçants servent à financer le culte, qui vient d’être rétabli.
Foires et marchés à Saint-Genis-Laval
Emmanuelle Joly-Grégoire - ASPAL
Ce tableau détaillé montre que depuis le Moyen-âge - la première mention connue remontant à 1317 - les jours de foires et de marchés sont sujets à des variations constantes. Les changements politiques et les demandes des habitants et des élus sont souvent à l’origine des « péripéties de nos foires ».
Cinq siècles de foires et marchés à Saint-Laurent-de-Chamousset
Claude Longre
Les foires de la commune remontent à plus de cinq cents ans. Le marché traditionnel le plus marquant est le marché aux veaux du lundi, qui joue un rôle important dans la région et représente une « véritable mercuriale sur une grande partie de la France agricole ».
A djimècre vé la Vill’a
Pierre Lhopital
Le marché du mercredi est plusieurs fois centenaire. Citant différents auteurs, l’article souligne les différences selon les époques tout en soulignant la permanence de ce marché, symbolisé par la petite salutation francoprovençale, citée dans le titre, qui y fait allusion dans toute la région.
Marché de Villechenève - Querelle autour d’une place
Céline Ferriol
Ce texte illustre les conflits qui peuvent éclater à propos de l’emplacement du marché hebdomadaire dans une même commune Le marché a une grande importance dans la société villageoise : « Lieu de rassemblement et d’échanges par excellence, son sort ne laisse personne indifférent ».
Des mesures qui ont la vie dure...
Louis Drevet
Un spécialiste donne un aperçu des origines des poids et mesures en France et des changements apportés lors de la Révolution. Suit un exposé instructif sur les traces des anciens usages dans la vie courante, dans les métiers et dans le langage.
Poids, mesures et monnaies
André Hernoud
L’article dresse le tableau historique de l évolution des poids, mesures et monnaies du Moyen-âge à l’introduction du système décimal. Les spécificités locales du Lyonnais sont soulignées.
Foires et marchés après la Révolution
André Hernoud
Après la Révolution, des enquêtes préfectorales remettent de l’ordre dans l’établissement des foires et marchés. Le texte, où sont cités plus de vingt villages du Pays lyonnais, décrit les enquêtes et les conflits entre communes, qui sont souvent difficiles à régler par l’administration préfectorale.
Economie sociale de marché et développement des territoires
Christian Fougerouse
Cette étude originale englobe la totalité, urbaine et rurale, du Pays lyonnais de ces dernières années. Les spécificités actuelles du commerce lyonnais, aboutissement d’une longue tradition, sont mises en relation avec les associations des Coteaux et des Monts du Lyonnais, qui ont-elles-mêmes des caractéristiques marquées.
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